Mois: mai 2021
COULON (79) : un drapeau de la Libération sort du grenier
8 mai 1945, la France est enfin libre. Le pays pavoise.
A Coulon, dans le quartier du Coin du Four la joie est intense. Les fusils cachés dans le double plancher d’un des greniers, juste au-dessus des Allemands qui avaient été logés dans une chambre réquisitionnée, vont pouvoir sortir au grand jour.
Au rez-de-chaussée, des petites mains s’activent. « Viens m’aider Thérèse, y’allons faire un drapeau. » C’est ainsi qu’Armandine Pillier s’adresse à sa jeune voisine Thérèse Legris. Il faut trouver ou bien teindre des étoffes, découper les croix de Lorraine qui orneront les deux côtés du drapeau. Armandine est couturière et a tôt fait d’exécuter sa tâche. Armand son père et Émile son mari confectionnent la hampe et découpent une boîte de conserve pour représenter le fer de lance. Tout cela est bien artisanal mais c’est l’intention qui compte et il faut faire vite, avec les moyens du bord.
Le drapeau est maintenant fixé à une fenêtre et flotte au vent. Il ressortira régulièrement lors des anniversaires historiques puis sera remisé dans le grenier : ses couleurs ont passé et il n’est plus très présentable. Mais on l’a gardé précieusement en souvenir.

Avec lui a été conservée la mémoire de ce jour de liesse mais aussi celui des personnes qui ont peuplé la maison et ses dépendances. La vingtaine de soldats français de l’armée en déroute qui seront hébergés quelque temps dans les granges, l’un d’entre eux, un coiffeur, faisant même profiter de ses talents tout le quartier. Les familles parisiennes réfugiées chez les Pillier ou dans le voisinage, les Personnat qui étaient déjà retournés depuis deux ans dans la capitale et une famille russe dont j’aimerais connaître le sort. Ce sont leurs deux enfants, Sonia et son frère, qui apparaissent sur la photo auprès de Mme Personnat, d’Armandine serrant comme toujours un chien dans ses bras et de son père Armand.

Aujourd’hui, 8 mai 2021, le drapeau est ressorti et a, à nouveau, flotté à la fenêtre. Certes, le bleu n’est plus très bleu mais il était toujours agité par un grand souffle de liberté.
Antoinette Petit
MAGNE (79) Les 30 ans du Square du 11ème G.R.C.A.
Le 8 mai 1991, la municipalité magnésienne, conduite par son maire M. Jean Thébault, honorait le 11ème Groupe de Reconnaissance de Corps d’Armée formé à Magné en septembre 1939, avec des éléments de réserve. L’histoire du « Square du 11è G.R.C.A. », un parking municipal ainsi nommé en souvenir d’une Amicale locale dissoute.
Créées de juillet à septembre 1939, les unités Groupes de Reconnaissance de Corps d’Armée (G.R.C.A.) ont été dissoutes à l’armistice de 1940. Les G.R.C.A. avaient été formés par les Centres de Mobilisation de Cavalerie (C.M.C.). Ils étaient principalement composés de réservistes. Les G.R.C.A. étaient structurés selon deux modèles : les G.R.C.A. comprenant uniquement des unités motorisés (les 1er, 2e et 3e G.R.C.A. ) ; les G.R.C.A. mixtes comprenant des unités à cheval et des unités motorisées. Les mixtes étaient nommés du 6e au 25e G.R.C.A. dont le 11e.


Lors de l’inauguration du Square du 11e G.R.C.A., M. Carillon (photo ci-contre), dernier secrétaire de l’Amicale du même nom, a retracé l’histoire de son régiment [Un texte extrait du guide annuaire municipal n°13-1991] : « Pour tous les anciens combattants et la population, le 8 mai 1945 a été une date historique, l’hégémonie nazie était anéantie et chacun poussait un soupir de soulagement après cinq années d’occupation allemande. Aujourd’hui 8 mai 1991, restera aussi pour le 11e G.R.C.A. une date historique. Formé à Magné en septembre 1939, avec des éléments de réserve, sous le commandement du Colonel Malcor, ce régiment, après dix jours de formation [au 9e Centre Mobilisateur de Cavalerie basé à Niort – NDLR], était dirigé sur la Lorraine. En tant que Groupe de Reconnaissance de Corps d’Armée, notre mission était d’être aux avant-postes pour surveiller l’ennemi, ses déplacements et l’efficacité de son armement.
Pendant huit mois, de la forêt de Warndt à Forbach, nous avons fait ce travail délicat et dangereux. A fin mai, nous avons dû partir pour la Somme pour aider à enrayer l’avance ennemie. Efforts sans résultat puisque le 6 juin, nous trouvant sur le passage des chars à Guderian, le régiment fut complètement décimé : morts, blessés, prisonniers ne se comptaient plus. »
La bataille de France
Le 11e G.R.C.A. a donc combattu lors de « la bataille de France ». Selon un article de l’encyclopédie libre Wikipédia : La bataille de France ou campagne de France désigne l’invasion des Pays-Bas, de la Belgique, du Luxembourg et de la France, par les forces du Troisième Reich, pendant la Seconde Guerre mondiale. L’offensive débute le 10 mai 1940 mettant fin à la «drôle de guerre». Après la percée allemande de Sedan et une succession de reculs des armées britannique, française et belge, ponctuée par les batailles de la Dyle, de Gembloux, de Hannut, de la Lys et de Dunkerque, elle se termine par la retraite des troupes britanniques et la demande d’armistice du gouvernement français, qui est signé le 22 juin 1940, les militaires ayant refusé la capitulation.

Une Amicale fondée dès la Libération
M. Carillon poursuit : « Après la fin des hostilités et le retour des prisonniers, le Colonel Malcor, avec l’aide d’un Groupe d’officiers, fonda le 19 septembre 1947 à Magné, l’Amicale du 11e G.R.C.A..
Il regroupa les restes du régiment, et, pendant 22 ans, en assura la présidence. Après la mort du colonel, le 19 septembre 1969, l’Amicale subit une certaine désaffection. En mars 1971, au cours d’une réunion à Poitiers, monsieur Jacques De Luze, lieutenant à l’escadron motos était sollicité pour reprendre le flambeau. Il en accepta la présidence me demandant d’en assurer le secrétariat. Malheureusement, le 13 juillet 1990, notre président était emporté brutalement à l’affection des siens et de nous tous. N’ayant plus de président, ni de vice-président, les membres de notre amicale, âgés et ayant beaucoup de difficultés à se déplacer, notre dernière réunion se tiendra aujourd’hui [8 mai 1991]. Mais cette dernière réunion sera marquée d’une date qui restera au fond de nos cœurs. Un hommage qui touche très profondément tous mes camarades. »
Un Square pour ne pas oublier

« 1939…1991, cela fait 52 ans que votre groupe avait été formé à Magné, » a rappelé le maire M. Thébault, « et vous aviez autour de 20 ans en 1939, car tous, vous étiez mobilisés et non appelés. Vous veniez à vos assemblées générales à Magné avec vos familles tous les deux ans; cela paraissait faire nombre et vous nous sembliez plus jeunes. Vous renoncez aujourd’hui à vous compter pour oublier le temps, mais non les circonstances qui vous avaient réunis ici en 1939. J’ai donc proposé au conseil municipal de donner le nom de votre régiment à une rue, c’est un square finalement qui a été retenu. Il est à l’entrée du bourg, parmi les sportifs et autres qui se poseront des questions à votre sujet. Nous leur répondrons en leur apprenant l’histoire de votre formation et les faits d’armes que vous avez accomplis dans cette « drôle de guerre ». Monsieur Carillon, messieurs les membres de l’Amicale, nous ne savons pas assez de choses sur votre régiment, sur votre Groupe de Reconnaissance. Je crois qu’il faudra toujours garder un certain esprit patriotique, et le souvenir des sacrifices consentis et des atrocités commises pour que cela ne se reproduise plus. »
HISTORIQUE du 11e G.R.C.A.
Groupe de commandement:
– Colonel Malcor.
– adjoint: Capitaine Burot de l’Isle puis capitaine Chaix
escadron hors rang:
– Capitaine Ausseur puis capitaine de Broucker.
- Formé à Magné, près de Niort, et embarqué à destination de la Warndt.
- En ligne, secteur de Carling (19-09-1939).
- Déplacement dans le secteur de la Petite-Rosselle, bois de Forbach (03-10-1939).
- Mouvement sur le secteur d’Emmenweiller (14-10-1939).
- Renforcé de 2 bataillons et de 2 batteries, en ligne à Longeville les Saint-Avold (secteur de Faulquemont) (22-10-1939).
- Prise de contact avec l’ennemi, patrouilles et organisation de PA
- En ligne sur la ligne Maginot (12-05-1940).
- Embarqué pour la Somme et rattaché à la Xe Armée (25 mai au 1er juin 1940).
- Occupation défensive de la ligne Poix-Hornoy et Tieulloy–l’Abbaye (02-06-1940).
- Violentes attaques ennemies repoussées grâce à une résistance opiniâtre des PA du GR, à l’aérodrome de Poix, à la ferme d’Hervilly, à Hornoy et à Thieulloy. L’escadron mitrailleuses et canons est submergé après avoir repoussé trois assauts de chars (05 et 06-06-1940).
- Réduit à 5 pelotons, forme Groupement avec les débris de 2 bataillons de Chasseurs et 2 groupes d’artillerie aux ordres du commandant du GR, reçoit l’ordre d’interdire le passage de Morvillers, puis repli derrière la Bresle en direction de Rouen. Encerclé à Saint-Valery-sur Somme, reçoit ordre de déposer les armes.